Lorsque Mathieu BEAUMORD grandit dans les années 1710 au lieu-dit La Grange Poirier1, à la sortie du Dorat, il ne se doutait pas que 300 ans plus tard, ses héritiers porteraient encore ce nom, ni que son "petit-petit...petit fillot" réaliserait un site web sur son patronyme !
Très probablement l'un des enfants de Mathieu BOSMORT, laboureur qui vint s'installer à La Grange Poirier quand il épousa en 1701 à Voulon une Gabrielle IMBERT, originaire du lieu, Mathieu eut relativement peu d'enfants, en tout cas si l'on se réfère à ce qui reste des archives locales (certains registres ou pages ayant disparu au fil du temps, au Dorat notamment) : de sa première épouse Anne PERPEIX, on lui connait une fille, Louise BAUMORD, née vers 1739 (mariée à un maçon, Simon GENTY), et sans doute un fils prénommé Jean, né en 1754, laboureur comme son père ; de sa seconde épouse Anne MAURIAT, il eut au moins deux fils : Jean Israël2 Théobal BEAUMORT, né en 1765, dont on peut supposer qu'il décéda jeune, et son dernier enfant, François, qu'il eut à plus de 65 ans 3 et n'eut pas beaucoup le temps de connaître. C'est de ce dernier pourtant qu'allait naître la plus grande famille BEAUMORT encore présente aujourd'hui.
François BEAUMORD, que certains actes appellent aussi Vincent BEAUMORT (probablement un nom d'usage4), se maria en 1797 avec Marie (de)LARAT au Dorat, commune où il vécut, près du fournil. Ils eurent six enfants, tous nés au Dorat :
1°) Jean BOMORD, né en 1798 et décédé à l'âge de six mois.
2°) Louis BEAUMORD, né en 1800 (également appelé Jean-Baptiste), cordier de son état, eut quatre filles, qui deviendraient Mesdames PETIT, LÉTANG, REBEYRAT et MOULINOT entre 1852 et 1856.
3°) Léonard BEAUMORD (également appelé Alexis), né en 1803, d'abord tailleur d'habits au Dorat, épousa Marie dite Rose DUSSOUX, et s'installa à Cromac, où il devint charcutier. Il eut deux enfants : Catherine-Adèle BAUMORT née en 1827 au Dorat, qui épousa Narcisse GAUTIER de Belabre dans l'Indre (le couple s'installant ensuite à Saint-Cloud, en région parisienne), et Pierre BAUMORT, né en 1835 à Cromac, paveur, qui se retrouva désigné par tirage au sort pour faire son service militaire au 102e de ligne en 1856. Il épousa Céline HUSSARD et devint cantonnier à Cromac (voir plus loin).
4°) Marie Louise dite Louise BEAUMORT, journalière née en 1805, dont la fille naturelle fut reconnue par mariage avec Jean Baptiste BLOND mais décéda à un an.
5°) Thérèse BEAUMORD, dont on ne sait rien, si ce n'est qu'elle naquit en 1808.
6°) Et enfin un second Louis BEAUMORT, né en 1809, charpentier, qui partit s'installer à Bellac où il épousa Marguerite MOREAU en 1832. Hélas, cinq de leurs sept enfants décédèrent en bas âge ; le même destin frappa trois des sept enfants de leur fils François BEAUMORT (dit "Emile"), charpentier. Ses deux fils partirent apparemment à Rochefort et s'y marièrent, Désiré BEAUMORT qui y demeura et y eutune descendance, Théodore BEAUMORT s'installant ensuite à Paris, puis à Nogent-sur-Marne ; la fille de ce dernier, Marcelle Jeanne BEAUMORT, devint une pianiste concertiste estimée, tandis que son fils Charles BEAUMORT se retrouva prisonnier au Stalag IIB durant la seconde guerre et finit boulanger (comme son oncle breton), dans le Val-de-Marne. Ces derniers étant sans enfants, la seule branche à pouvoir transmettre le nom fut donc celle de Léonard.
Revenons donc à notre cantonnier de Cromac, Pierre BAUMORT. Son mariage ainsi que l'origine même de son épouse sont auréolés de mystère. En effet, Marie Elise dite Céline HUSSARD est dite, sur son acte de décès de 1908, native du Dorat en 1843 ; or son patronyme même ne s'y est jamais trouvé à l'époque, aucune Marie Elise n'y est née ladite année, et aucun mariage BAUMORT-HUSSARD n'a été trouvé en Basse-Marche... Il semble donc raisonnable de penser que Pierre est monté sur Paris dans les années 1860, sans doute pour y travailler un temps comme paveur, y a rencontré Céline et l'a épousée en proche banlieue parisienne (l'acte est introuvable à Paris même) avant de repartir avec sa famille en Haute-Vienne, ce qui expliquerait que leur premier fils Emile soit né à Paris en 1867 et non comme les autres enfants à Cromac.
Pierre et Céline eurent six enfants, quatre garçons et deux filles :
1°) Emile BEAUMORT, l'aîné, cimentier qui monta à Paris à la fin du 19e siècle et épousa Marguerite "Julia" BARRÉ, de Grayan en Gironde. Ils vécurent dans l'Ile Saint-Louis, puis dans une maison qu'Emile bâtit au 16 Villa Amélie, dans le 20e arrondissement (remplacée depuis les années 90 par un immeuble neuf). Emile décéda en 1938 à l'âge de 71 ans. Il n'eut pas de descendance, puisque sa fille Lucie ne vécut que deux ans, et son fils André, métreur, marié à Suzanne CHEVALIER, mourut à 63 ans sans enfants.
2°) Paul Léon dit Paul BEAUMORT, cimentier, monta à Paris avec son frère et épousa la soeur de Marguerite, Marie "Lucie" BARRÉ. Il se mit ensuite à son compte comme entrepreneur de travaux publics et démarra aussi en parallèle un bar à vins dans le Marais, mais il mourut jeune, à 42 ans. Ils vécurent eux aussi dans l'Ile Saint-Louis, au 27 quai d'Anjou, où ils eurent tout d'abord un fils, Georges, métreur (photo ci-contre), qui resta vieux garçon jusqu'à sa mort à 68 ans, et qui semble-t-il ne laissa pas un très bon souvenir aux autochtones durant ses années de service comme soldat auprès des tirailleur sénégalais au Gabon. Ils eurent aussi deux filles jumelles, Andréa et Georgette, qui vécurent ensemble toute leur vie dans la maison bâtie par leur père au Blanc-Mesnil (97 avenue Pasteur), sans jamais se marier, la seconde y décédant 20 ans après sa soeur, au bel âge de 97 ans !
3°) Marie Eglantine dite Eglantine BAUMORT, morte à 2 ans. Aucun autre détail n'a subsisté sur cette enfant.
4°) Marie Louise Eugénie dite Louise BEAUMORT, qui vécut jusqu'à 86 ans sans se marier, travaillant comme bonne à Paris jusqu'à près de 80 ans, et qui eut la mauvaise fortune de se faire voler toutes ses économies, alors qu'elle était hospitalisée à Limoges, par ses derniers employeurs soi-disant venus s'enquérir de sa santé ! Elle décéda à Cromac, dans la minuscule maison qu'elle avait héritée de ses parents.
5°) Un second Emile, dit Emilien BEAUMORT, maçon, géomètre et cimentier, le seul dont la descendance vive aujourd'hui (voir plus bas).
6°) Et enfin Léon Jules, dit Léon BEAUMORT, le seul qui ne quitta pas sa Haute-Vienne natale, à part pendant ses années sous les drapeaux, et qui y perdit hélas plusieurs doigts par l'explosion de grenade, ce qui l'obligea à prendre un emploi de postier dans sa ville des Grands-Chézeaux au lieu de suivre ses frères dans les métiers du bâtiment. Il n'eut qu'une fille, Lucienne, la seule femme sur cinq dernières générations de cette famille BEAUMORT qui se soit mariée, mais qui refusa toute sa vie de vivre chez son mari, préférant rester chez ses parents et rendre visite à son époux les week-ends. Elle n'eut pas d'enfants... mais faut-il s'en étonner ?
Pierre décéda à Paris en 1902, à l'âge de 67 ans, d'un cancer qu'il était venu soigner en vain. Sa femme Céline décéda à Cromac six ans plus tard. Leur fils Emilien BEAUMORT eut aussi six enfants, comme son père : cinq garçons et une seule fille. La mère, Maria JAMMES (native de Sousceyrac, dans le Lot), qu'il avait épousée à Paris en 1907, était porteuse de pain dans le Marais et fréquentait déjà le café BEAUMORT rue des Jardins Saint-Paul (habitant une chambre juste au-dessus) quand elle rencontra son futur époux. Ils s'installèrent successivement dans le 3e arrondissement, dans l'Ile Saint-Louis, puis dans une maison construite pour eux par le frère aîné Emile à Vitry-sur-Seine
(au grand dam de Maria, qui ne rêva toute sa vie que de son Quercy natal, où d'ailleurs elle finit ses jours). Bien qu'ils aient été à l'école, comme en témoigne un émouvant cahier de 1897 d'Emilien parfaitement préservé, et de nombreuses lettres de Maria, ce sont leurs enfants qui purent véritablement obtenir une éducation solide, ce qui n'était pas facile si l'on considère qu'élever six enfants avec un seul revenu n'était pas simple. Ils devinrent comptable, secrétaire (puis représentant pharmaceutique), intendante de l'assistance publique, photographe ou docteur en droit, et seul le dernier choisit une voie plus dans la lignée de la tradition familiale puisqu'il devint peintre-décorateur. Emilien mourut en 1948 à l'âge de 70 ans, et sa femme Maria en 1963.
Cette famille BEAUMORT reste la plus représentée aujourd'hui.
Les grandes tendances qui ont marqué cette famille sont intéressantes : d'abord, une très forte proportion de garçons, qui explique que cette branche ait pu survivre jusqu'à nos jours ; ensuite, la présence de nombreux célibataires endurcis sur plusieurs générations (même s'il y a eu aussi pas mal de mariages) ; et enfin, et surtout, le fait que depuis le mariage de Catherine-Adèle en 1848, et même si elles ont eu des enfants, aucune femme ne s'est mariée, la seule exception étant Lucienne, qui ne voulut jamais vivre avec son mari...
1 Voulon (ou Voulons) qu'il ne faut pas confondre avec le Voulon situé dans la Vienne, était autrefois une commune à part entière qui touchait la ville du Dorat, et qui lui fut finalement rattachée en 1824. (retour)
2 La présence du prénom Israël pourrait surprendre ; en fait, Saint-Théobald et son disciple Saint-Israël sont tout simplement d'anciennes figures religieuses locales dont on ressort tous les sept ans les reliques à l'occasion des célèbres ostensions du Dorat. (retour)
3 Le cas d'Anne MAURIAT est difficile, car selon les actes elle est appelée MAURICET, et même MORELLE ! (retour)
4 La pratique était fréquente à l'époque, d'autant plus que l'on puisait dans une quantité très limitée de prénoms, et qu'en présence de plusieurs Jean ou Léonard, parfois frères entre eux, il fallait pouvoir faire le distingo ! (retour)
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